lundi 18 janvier 2010

Saintes :
Les avocats privés de parole…


Vendredi dernier, les avocats ont laissé vide l’espace qu’ils occupent habituellement au Tribunal de Grande Instance, y déposant seulement leurs longues robes noires. Non pas en signe de deuil, mais de mécontentement…

Quelle est la raison de cette malheureuse affaire ? Il faut savoir que dans les grandes villes comme Paris ou Lyon, existent deux audiences solennelles de rentrée : l’une est organisée par les magistrats, l’autre par l’ordre des avocats. Les deux événements sont distincts.
Lors de l’audience mise en place par ses pairs, le bâtonnier peut exprimer librement ses sentiments, voire ne pas mâcher ses mots… sur la réforme de la carte judiciaire par exemple.
Dans les petites villes, les choses sont différentes car une seule audience de rentrée a lieu, encadrée par les Tribunaux. Les avocats sont alors "invités" et le bâtonnier prononce généralement une allocution faisant suite à celles du Président et du Procureur.

Récemment, la teneur « virulente » de certains discours aurait vivement déplu, dit-on, et l’affaire serait remontée en haut lieu. En conséquence, et sans doute par prudence, M. Main, Premier Président de la Cour d’Appel de Poitiers, a demandé aux avocats de ne pas pendre la parole, vendredi dernier au TGI de Saintes.

Une décision plutôt mal vécue par les intéressés, d’où leur réaction. « À Saintes, les avocats s’expriment lors de cette rentrée depuis des lustres » souligne Me Huberdeau, bâtonnier. Et d’ajouter « j’ai rencontré le Premier Président et nous en avons discuté. Effectivement, les magistrats de la juridiction n’ont aucune obligation envers nous, mais une coutume s’est instaurée. Cette année, seuls les avocats de Bressuire et de Rochefort ont été épargnés par cette mesure. Est-ce parce que ces tribunaux fermeront fin 2010 ? En laissant nos sièges vides, nous avons manifesté notre déception. Pour beaucoup, cette interdiction est un camouflet ».

Ce geste restera symbolique car le Barreau n’a pas pour habitude de faire des histoires. D’ailleurs, les avocats pouvaient assister au vin d’honneur s’ils le souhaitaient. Ceci dit, les gens de robe entendent préserver leur liberté d’opinion…


Photo 1 : L'espace réservé aux avocats était vide...

Photo 2 : Me Huberdeau face aux journalistes

Photos 3 et 4 : Situation plus souple au Tribunal de Commerce où le Bâtonnier de Saintes s'est exprimé librement à l'occasion des vœux

• L'info en plus

En novembre 2009, une histoire "contraire" s’est produite à Mulhouse où le Barreau fêtait le 150e anniversaire de sa création. De nombreuses personnalités étaient présentes dont le maire de la ville, Jean-Marie Bockel, secrétaire d’État à la justice. Non seulement, il essuya les critiques des avocats, inquiets du « tsunami de réformes » entreprises par le Gouvernement, mais il ne put leur répondre, n’y étant pas invité…

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