jeudi 15 mai 2014

Jonzac : Coline, Sarah Jeanne
et Ryan ont rendu hommage
à Marie, morte au camp d’Auschwitz à l’âge de 11 ans


Le 8 mai, qui commémore la libération des camps de concentration par les Alliés et marque la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe, est un événement célébré chaque année. Il permet de sensibiliser les jeunes générations aux vieux démons qui peuvent surgir en des périodes agitées et raviver la mémoire. Le gouvernement de Vichy, en particulier, a commis des actes que nous ne devons pas oublier dont la rafle du Vel’ d‘Hiv les 16 et 17 juillet 1942. 

Ils s’appellent Coline, Sarah Jeanne et Ryan. Elèves de cours moyen, ils fréquentent l’école primaire André Malraux et préparent leur future entrée au collège. Ils vivent dans un pays en paix et jouent comme tous les enfants de leur âge, avec cette insouciance qui leur va si bien.
Cette année, dans le cadre scolaire, ils ont fait la connaissance de Marie, une petite fille qui a vécu les affres de la Seconde Guerre mondiale. En découvrant les lettres adressées à son père, en pénétrant son univers secret, ils ont réalisé que les situations pouvaient se suivre et ne pas se rassembler.

Les enfants et leur directeur Yvon Chevallier
Jeudi dernier, jour de la célébration du 8 mai, ils avaient le cœur qui battaient aux côtés de leurs camarades et d'Yvon Chevallier, leur directeur. Autour d’eux, devant le monument aux morts où flottait le drapeau tricolore, il y avait des hommes en uniforme, des personnalités à la mine grave dans leurs costumes foncés, des porte-drapeaux, le corps des sapeurs-pompiers, la fanfare et des personnes parmi lesquelles ils ont reconnu des êtres proches.


Bientôt, ils allaient prendre la parole devant ce parterre attentif : la timidité risquait-elle de les surprendre au détour d’une phrase, d’une émotion ? La volonté a été la plus forte. Marie, qui est devenue leur amie invisible, a poussé leurs limites : ils se sont exprimés en son nom, contant sa triste et brève existence qui rejoint celle des sacrifiés de cet horrible conflit.

Bernard Verhoest, président des Anciens Combattants
Ne pas oublier 

Dans le discours qui suivit ceux de Jean-Philippe Aurignac, sous-préfet, et Bernard Verhoest, président des anciens combattants, Jean-Claude Laby fit référence à la rafle du Vel’ d’Hiv. Arrrêtés, 7000 Juifs y vécurent dans l’humiliation, la dégradation physique, affamés, en plein mépris sous le regard indifférent de la gendarmerie et de la police tricolores. Les Allemands avaient appelé cette opération « vent printanier ». Un blizzard en réalité.
La France n’avait pas connu d’évènements aussi tragiques envers des compatriotes depuis la Saint-Barthélémy en 1592, où plus de 3000 protestants furent arrêtes ou passés au fil de l’épée, ou en 1307 quand Philippe le Bel, envieux de la richesse des Templiers, fit détruire l’ordre et brûler son grand maître Jacques de Molay. Cette France, qui brille de tous les feux de la liberté les jours de 14 juillet, possède des zones d’ombre…
 « Ni haine ni oubli » disent les rescapés des camps de concentration (dont Michel Cavaillès qui nous a quittés en 2012). Néanmoins, si le pardon est nécessaire, il ne faut pas oublier que les savants calculs des uns peuvent conduire à l’anéantissement des autres. D’où l’importance de transmettre le flambeau.

Jean-Claude Laby aux côtés de Ryan, Coline et Sarah Jeanne
Georges Weller, dans son livre « L’étoile jaune à l’heure de Vichy » relate le déroulement des opérations du Vel’ d’Hiv. Il a également rapporté les courriers d’une petite fille âgée de 10 ans, arrêtée à Paris avec sa mère, ce fameux 16 juillet 1942. Cette enfant, c’est Marie. Coline, Sarah Jeanne et Ryan en ont lu des extraits.
Prisonnière, elle ne comprend pas ce qui lui arrive. Au départ, elle s’accommode, puis elle tombe malade. Le plus extraordinaire, c’est qu’elle ne pense pas à son sort mais à celui de son père, cruellement absent. Dans sa huitième et dernière missive, elle demande une photo de ses parents. Elle ne la recevra jamais. Elle fut exécutée ou plutôt gazée - comme tant d’autres - à l’âge de 11 ans le 23 septembre 1942 dans le sordide camp d’Auschwitz.
On a du mal à comprendre comment un véritable système d’extermination a pu se mettre en place, comme si les efforts qu’avait fait l’humanité pour se civiliser au cours des siècles s’étaient finalement inclinés devant la barbarie organisée (les chambres à gaz et les fours crématoires correspondaient à des plans d’ingénieurs et leur construction était soumise à des appels d’offres auprès d’entreprises).
« Marie n’est pas morte seule, mais entourée de tous ces Français qui se battaient pour faire naître l’espoir et sortir de l’obscurité » souligna Jean-Claude Laby. « Elle est morte entourée de tous ceux qui ont su se lever, ces résistants torturés par la Gestapo, assassinés pour avoir dissimulé des alliés, fusillés un matin dans un village. Elle est morte entourée de tous ceux qui ont su dire non, qu’ils soient Français ou alliés débarqués sur les plages de Normandie. Le 8 mai, il est de notre devoir de rendre hommage à ceux qui sont morts pour la France. Cet anniversaire est l’occasion de transmettre à la jeunesse un message d’espérance en l’invitant à respecter les valeurs nationales qui ont fait la richesse de notre civilisation».

Jean Grimbert distingué par Jean-Claude Beaulieu
Jean Grimbert (de Villexavier) et sa famille
Lors du vin d'honneur, Jean Grimbert félicité par Claude Belot et Madeleine Perrin
Durant cette cérémonie, Jean Grimbert, âgé de 90 ans, combattant dans un régiment d’artillerie coloniale en Indochine, a reçu la Croix de guerre des théâtres d’opérations extérieurs. Cette distinction lui a été remise par Jean-Claude Beaulieu, conseiller général et colonel de réserve.



Ont remis des gerbes Jean-Philippe Aurignac, sous-préfet, le dr Beaulieu, conseiller général, Claude Belot, sénateur maire de Jonzac, Christine Cavaillès, présidente des Amis de la fondation pour la mémoire de la déportation, Michel Galley de l’association des victimes du STO, Jean-Claude Laby de l’Union nationale des combattants. 

• Après l’hécatombe de la guerre 14-18, les peuples sont repartis au combat en 1939. Avec une cruauté telle que la mémoire des Poilus, qui avaient tant souffert, en était bouleversée : à quoi donc avait servi leur sacrifice ? Les archives concernant Hitler sont révélatrices. Une succession d’évènements l’ont porté au pouvoir, lui qui voulait être peintre et avait échoué à l'examen d'entrée de l'Académie des Beaux-Arts de Vienne. L’histoire aurait-elle été différente s’il avait été admis dans cette école ? La question mérite d’être posée. La haine qui l’envahit fut contagieuse. Elle contamina ses compatriotes comme elle se répandit sur des Français soumis au dictat de l’occupant.

• La rafle du Vélodrome d’Hiver : Pour la première fois en France, des femmes et des enfants juifs sont raflés en juillet 1942. Les Juifs arrêtés sont transportés par autobus au Vélodrome d’Hiver ; les célibataires et les couples sans enfant sont conduits au camp de Drancy, puis déportés au camp d'Auschwitz. Les familles sont dirigées dans les camps de transit de Beaune-la-Rolande ou de Pithiviers où elles sont séparées de force dans des conditions atroces avant d'être à leur tour déportées vers Auschwitz. Cette opération entraîna l'arrestation de 13 152 Juifs (4 115 enfants, 2 916 femmes et 1 129 hommes.

• Le programme nazi prévoyait la déportation de 30 000 Juifs de la zone occupée et 10 000 de la zone libre. Le gouvernement français dirigé par Pierre Laval limite les arrestations aux Juifs étrangers ou considérés comme « apatrides ». Adolf Eichmann négocie avec la police française – Jean Leguay, délégué de la police de Vichy en zone occupée et René Bousquet, secrétaire général de la police française – qui accepte de collaborer et d'organiser seule la rafle.

• En 1993, une journée nationale commémorative a été instituée par le président François Mitterrand, mais c’est son successeur Jacques Chirac qui a reconnu, au nom de la République, la complicité de l’appareil de l’État français dans la persécution des Juifs.

• Auschwitz a constitué la plus gigantesque entreprise criminelle de l'histoire de l'humanité. Là, les nazis ont construit la plus scientifique usine d'extermination de tous les temps. Plus de 1 500 000 personnes sont vraisemblablement passées dans le complexe d'Auschwitz (Auschwitz I-Stammlager, Auschwitz II-Birkenau, Auschwitz III-Monowitz et leurs kommandos). Les historiens et les chercheurs ne sont pas d'accord sur le nombre des morts d'Auschwitz. Il semble qu'il a dû être voisin de 1 200 000 .

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