mardi 10 juin 2014

Super-régions : La nouvelle fronde des Grands du royaume !


XVIIe siècle : Louis XIV, qui n’est qu’un enfant, découvre que la vie n’est pas un long fleuve tranquille. Avant qu’il ne brille de tous ses feux, il assiste à la « Fronde », contestation de l'autorité royale par les parlements et la noblesse, qui résulte de la trop forte imposition mise en place par Mazarin. Ce mouvement marquera à jamais son esprit. On le serait à moins. Il n’a que 12 ans (l’âge des enfants de 5e au collège !) quand il entre au Conseil en 1650. Plus tard, hanté par la rébellion, il ne poursuivra qu’un seul but : transférer la réalité du pouvoir à une administration centralisée en affaiblissant la noblesse d'épée qu’il confine à la Cour. Cette dernière tombe dans le piège. Le tour est joué.


XXIe siècle - 2014 : François Hollande, dont les 12 ans sont déjà lointains, a enfin trouvé la réforme qui fâche absolument : celle de l'administration territoriale.
Il y a des années que les citoyens paient des impôts locaux de plus en plus lourds pour financer une nouvelle féodalité née des lois de décentralisation - concoctées par Gaston Defferre à l’époque Mitterrand, puis par Jean-Pierre Raffarin - dans le but, louable, de redonner du dynamisme aux territoires.
Très vite, une nébulosité est apparue quant aux compétences. Des communes, on les a transférées aux intercommunalités sans légitimité démocratique, en s’appuyant sur des Régions concurrençant les Départements, ayant eux-mêmes créé toutes sortes d'institutions (syndicats, unions) pour traiter le domaine d'une compétence générale dont ils héritaient.
Tout un monde d'élus locaux, dépendant souvent pour leur propre carrière d'un chef de file ayant conquis de haute lutte son poste à responsabilités, s’est alors développé, faisant vivre les partis politiques. Pour se donner consistance, les communautés d’agglomération et les communautés de communes ont alors enfanté un nombre incroyable de fonctionnaires territoriaux dont les charges salariales sont devenues un vrai casse-tête.
Sur le terrain, une toile d’araignée s’est tissée faisant apparaître des relations parfois ambigües avec des entreprises privées clientes, des fournisseurs et des prestataires de services dans cet immense marché gonflé sans cesse par les demandes des associations et toutes les nouvelles normes sortant de l'imagination des groupes d'influence, des lobbies et parfois même de l'Etat.

Il était donc urgent de clarifier ce monde opaque, coûteux, dispendieux et trop indépendant… D’où l’idée de François Hollande de reprendre la main en réduisant le nombre de strates du millefeuille. La carte des super-régions, qui pointe une épée de Damoclès sur la tête des départements, est révélatrice de cette démarche. Personne ne sait d'ailleurs à combien se chiffrera l'économie, quelle sera l'efficacité de la nouvelle organisation, comment seront dévolues les compétences et comment sera reconquise la démocratie locale… 

Dans l’arène, on s’inquiète : personne ne veut lâcher une once de pouvoir ! Il est évident que les intérêts et les influences contradictoires vont s'affronter, argumenter et défendre leur pré carré. En province, la fronde des barons est en marche et les pétitions circulent sur internet. Imiteront-ils le Parlement de Paris qui, en 1648, avait rédigé une charte de vingt-sept articles afin de réformer l’État ? Il y était question de ne lever aucun impôt qui n’ait été auparavant validé par ce même Parlement…

Ce qui est certain, c'est que la partie sera serrée. La pièce ne fait que commencer. Elle devrait durer un temps certain.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Un seul mot, Nicole : BRAVO