mercredi 24 septembre 2014

Libre expression :
La guerre de Dieu


Entre l’Irak et la Syrie ravagées, quelques nostalgiques du passé ont réinventé le Califat, c’est-à-dire l’empire de Dieu sur terre, né de la guerre des Abbassides et des Omeyyades, qui a pris fin en 1920 aboli par Mustafa Kemal après la chute de l’empire Ottoman.

Au centre, Mustafa Kemal
Le Royaume de Dieu sur terre, toutes les religions en ont rêvé puisque l’homme a créé Dieu à son image et lorsqu’on entend les prêches de al-Baghdadi, on se dit que Dieu, décidément, à des allures bien cruelles ! Mais Dieu est grand. Il comprend tout, les massacres des croisades, des guerres de religion, les Borgia, les vendeurs d’indulgences, les négociants en grâces, les grands inquisiteurs, les juges de Jeanne d’Arc et les persécuteurs des apôtres.


Nos civilisations ont voulu croire qu’en devenant laïques, humanistes et fraternelles, elles échapperaient à la guerre. Pure crédulité ! Nous avons eu des guerres épouvantables, des guerres sans Dieu, du fascisme et du communisme, des guerres idéologiques. Comme si la guerre était inscrite dans nos gênes, inévitable et définitive.
Chaque tribu humaine défend ses intérêts et laisse sa trace sanglante dans ses ambitions et ses utopies. 

To be or not to be est une vieille histoire, plus vieille que le code d’Hammourabi, plus vieille que Sumer ou Akkad, mais c’est toujours dans cette région que les choses commencent, sur les rives du Tigre et de l’Euphrate.


Les Américains sont venus réveiller le monstre. L’Euphrate est si loin du Mississipi ! Bush voulait se venger des tours détruites et des milliers de morts de New York au cœur de la Pax americana. Il a eu les Afghans, les Arabes et finalement les musulmans fidèles aux bédouins du désert, ceux d’Ibn Saoud, tandis qu’il a poursuivi de sa vindicte les Perses chiites, peut-être les seuls à pouvoir remettre un peu d’ordre dans ce territoire.

Pourtant, tout ce remue-ménage était inscrit dans l’histoire que l’Occident voulait écrire et dont elle avait tracé les frontières au Traité de Sèvres, inventant la Syrie et l’Irak, le Liban et la Palestine, mentant aux Kurdes abreuvés de promesses tandis que la Compagnie Française des Pétroles contrôlait la Wilaya de Mossoul, la British Petroleum les autres gisements d’Irak et bientôt d’Iran tandis que l’Aramco américaine s’installait en Arabie Saoudite.


Dieu se faisait la malle, écœuré par ces odeurs de pétrole, et le Diable s’emparait des détails de la finance, tandis que la démocratie se planquait sous les palmiers. L’argent a ouvert le bal et la corruption l’a fait couler à flots jusqu’au cœur des républiques. Personne ne résiste à l’argent surtout lorsqu’il est lié au pouvoir et qu’il incarne le pouvoir. Les puritains protestants, les juifs et les catholiques sont passés à la caisse. Fallait donc que Mahomet s’en mêle ! C’est fait. Bernard Henri Lévy, qui a un sens infaillible de l’erreur en géopolitique, a chanté le printemps arabe pour obtenir de Sarkozy la fin de Khadafi. Tripoli est toujours en feu, Bagdad et Damas en ruines tandis qu’un nouveau général s’est installé au Caire pour chasser les frères musulmans…


Nous ne comprenons rien à tout cela. Nos conquêtes passées sont des bombes à retardement et aujourd’hui, nous faisons la guerre à un ennemi invisible.
 Alors, on pourrait sans doute arrêter, laisser les nobles seigneurs faire la guerre ou la paix au nom d’Allah, et nous retirer de l’ombre des créatures funestes que nous avons, avec délice, inventées.


X. de Roux

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