samedi 28 octobre 2017

Tribunal de Saintes : le 1er décembre, un procès historique opposera deux sociétaires "virés" au Crédit Agricole

Le 1er décembre prochain aura lieu, au Tribunal de Saintes, le procès qui oppose deux anciens sociétaires "sanctionnés" du Crédit Agricole, Lucien Normandin et Richard Baron, à cette banque dont le siège social a été transféré de Saintes à Lagord près de La Rochelle. 
L'article de Patrick Le Cellier, journaliste à Médiapart, résume cette affaire qui fait couler pas mal d'encre dans la cité santone... 

A l'annonce du transfert du siège social du CA, le mécontentement a été vif. Sur cette photo, les manifestants sont devant l'entrée du Hall Mendès France où se tient l'assemblée générale de la banque. Service de sécurité et entrées filtrées...
Se battre coûte que coûte (© Nicole Bertin)
Les sociétaires, pions ou patrons ? A Saintes (Charente-Maritime), le 1er décembre prochain, se déroulera un procès pas comme les autres, d'une importance très particulière pour le Crédit Agricole (Mutuel?) et ses dix millions de sociétaires. De propriétaires. Les vraies questions seront posées : où est la différence coopérative ? Pourquoi les sociétaires font-ils peur ?

Qu'est-ce que ça change une banque qui appartient à ses clients ? Quels sont les droits et les devoirs des sociétaires-propriétaires ? Comment s'applique la loi fondamentale du 10 septembre 1947 qui régit les sociétés coopératives ? Comment s'exerce le contrôle ? Quels risques prend un sociétaire qui fait son devoir ?
Lucien Normandin (71 ans) et Richard Baron (64 ans) sont deux sociétaires de la caisse locale de Crédit Agricole Mutuel de Saintes, société coopérative propriétaire de la caisse régionale de Charente-Maritime et, à travers celle-ci, de la Caisse Nationale (CASA). Lucien est sociétaire depuis 1980, Richard depuis 1988.
Le premier est retraité des collectivités locales, le second retraité de la société Coop Atlantique, où il était délégué syndical CGT. Lucien Normandin a très régulièrement participé aux assemblées générales de ses caisses locales successives. Ce sont, par ailleurs, des citoyens soucieux de l'avenir de leur ville de Saintes.
Pour leur intervention de sociétaires responsables, dévoués, Lucien et Richard ont été « sanctionnés » en octobre 2014, expropriés ! Ils ont donc assigné leur Caisse Locale de Crédit Agricole Mutuel pour faire respecter leurs droits. Pour exiger le retour dans les clous. Audience le 1er décembre à Saintes.

Délocalisation de la Caisse Régionale

Lorsqu’à été évoqué le transfert de la caisse régionale à La Rochelle, en 2012, Lucien et Richard ont alerté leurs concitoyens, mobilisé les municipalités du département, éclairé les médias. Impardonnable pour les « patrons auto-proclamés », cooptés, qui entendent agir à leur guise, sans complexe et sans contrôle. Les sociétaires exemplaires sont devenus des « ennemis » pour ces gestionnaires... en principe au service de l’Économie Sociale et Solidaire... en principe dévoués à une structure qui devrait être, au final, sans but lucratif.
Articles dans la presse, manifs, défilés, pétitions, création du site AREMUT (association pour la reconquête du mutualisme) suivi par des milliers d'internautes... les deux sociétaires ont multipliés - au côté des salariés - les initiatives pour mobiliser leurs concitoyens et sauver leur Caisse Régionale ! Le transfert a pourtant eu lieu en septembre 2016, et Saintes a perdu 270 emplois directs. Beaucoup plus au final.
Lucien et Richard y ont gagné la rancœur des « maîtres », défiés, qui ont décidé de les exclure, de les exproprier. De se venger. Déchéance de nationalité coopérative, déchéance de sociétariat ! Perte des droits. Représailles... Punition pour outrage à la nomenklatura d'une démocratie version ex-pays de l'Est, version Corée du Nord. Mise en évidence de l'arbitraire d'une démocratie-bidon. Terrifiant. Insensé. « Ferme ta gueule ou on te casse. »

Respecter la loi ?

Le respect de la loi devrait être une évidence... mais c'est le contournement de la loi - sa manipulation - qui est, trop souvent, le sport favori des dirigeants des grandes structures sans but lucratif. Tout spécialement dans le monde de la finance.
Les banques coopératives, grandes vedettes de l'économie française ? Une fiction, une tromperie formidable ! A partir d'un certain niveau de manipulation de la loi, les mots n'ont plus de sens...Les banques coopératives, vraie originalité... ou grosse astuce ?
Respecter la loi, c'est respecter la loi fondamentale qui régit les sociétés coopératives. La loi du 10 septembre 1947, léguée par le Conseil National de la Résistance (CNR). Et les grandes déclarations des congrès, symposiums et autres rassemblements des visionnaires, des idéalistes, des militants.
A moins que tout cela ne soit qu'un rideau de fumée. Des grands messes organisées pour amuser la galerie et couvrir une gestion opaque ? Les grands principes longuement discutés pour cacher les grosses magouilles ? La démocratie célébrée... et assassinée dans le même mouvement ?
Il appartient aux magistrats de faire respecter la loi, de faire respecter les sociétaires, le contrat, les droits des sociétaires. Sans l'intervention des magistrats, les mots perdraient leur sens et la loi sa valeur, son utilité. Les banques coopératives pourraient définitivement fonctionner comme des outils de confiscation au service de quelques dirigeants malins et bien placés.

Lucien et Richard

Richard Baron et Lucien Normandin (© Nicole Bertin)
Procès historique, donc, qui répondra aux questions de base, aux questions essentielles : qui décide au Crédit Agricole ? Qui est réellement propriétaire de cette banque coopérative ? Comment ça marche ? Quelle est la finalité ? Les valeurs sont-elles respectées ? La gestion démocratique est-elle une fiction ? L'utopie a-t-elle était confisquée, récupérée par quelques petits malins cupides ?
Retour au respect de la loi ou affichage de la destruction définitive du cadre légal des banques coopératives... le choix de l'orientation vaudra, probablement, pour l'ensemble des grandes coopératives (agricoles, de consommateurs, de commerçants, d'habitat, etc.).
Qu'y a-t-il de vrai - pour les banques coopératives - dans la mise en avant de leur identité et de leurs différences, qui en feraient une alternative exemplaire... face à la cupidité et à l'amoralité des banques commerciales ?
Les sociétaires Lucien Normandin et Richard Baron ont donc assigné, devant le TGI de Saintes, la Caisse Locale de Crédit Agricole Mutuel de Saintes, société coopérative - régie par la loi fondamentale du 10 septembre 1947 - dont ils sont propriétaires. Pour être rétablis dans leurs droits, pour sauver l'avenir, pour stopper les dérives. Ils ne le savaient pas mais c'est aussi pour sauver l'identité du Crédit Agricole. Pour protéger les droits de dix millions de sociétaires-propriétaires.
Rendez-vous au TGI de Saintes, place Foch, le 1er décembre 2017 à 9 h 30, pour tous les militants d'une économie réellement respectueuse de la planète et au service de l'homme. Pour les amoureux du respect de la loi.
Le 1er décembre, les magistrats vont dire le droit et, espérons le, interdire les coups tordus.

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